Les rafles dans les Alpes-Maritimes

À l’initiative du régime de Vichy, des rafles de Juifs ont lieu dans toute la France au cours de l’année 1942. Dans les Alpes-Maritimes, la population juive connait un répit lors de l’occupation du département par les troupes italiennes. Mais l’invasion du territoire par l’armée allemande provoque la reprise des arrestations et déportations des Juifs.

Les acteurs français de la répression

Le Service d’ordre légionnaire (SOL) et la Milice française sont les auxiliaires de Vichy. La police et la gendarmerie sont réquisitionnées pour arrêter les Juifs et les adversaires du régime de Vichy.

Le Service d’ordre légionnaire (SOL) est créé en août 1940, puis transformé en janvier 1943 en Milice française. Dirigée par le Niçois Joseph Darnand, elle est un outil de répression au service de l’occupant. En zone occupée, les mouvements d’extrême-droite, qui prospèrent grâce au soutien de l’occupant, œuvrent pour une collaboration totale avec le régime hitlérien afin d’éliminer Juifs et communistes et rendre la France fasciste.
Les deux principaux sont le Parti populaire français (PPF) de Jacques Doriot et le Rassemblement national populaire de Marcel Déat. Leurs groupes paramilitaires assistent les forces de répression allemande et leurs membres s’enrôlent dans la Légion des Volontaires Français contre le bolchevisme (LVF), créée en juillet 1941 pour combattre l’URSS.
Parmi la population civile des indicateurs ou des dénonciateurs anonymes signalent à la police la présence de Juifs hébergés clandestinement. La police et la gendarmerie sont réquisitionnées pour arrêter les Juifs et les adversaires du régime de Vichy.

Prestation de serment du Service d'ordre légionnaire, 1942

Occupation d'une synagogue par le Service d'ordre légionnaire, 1942

Compléments audio

Écouter le témoignage de Roger Wolman, enfant juif pendant la Seconde Guerre mondiale sur le compte des Archives départementales des Alpes-Maritimes sur Dailymotion :

Les rafles d’août 1942

Les 26 et 27 août 1942, 610 Juifs étrangers résidant dans les Alpes-Maritimes sont arrêtés par la police et la gendarmerie française, rassemblés à la caserne Auvare à Nice puis envoyés en train au camp de Drancy, en région parisienne.

En janvier 1942 les nazis décident de mettre en œuvre la « Solution finale » c’est-à-dire l’extermination de tous les Juifs européens. La section de la Gestapo chargée des questions juives planifie la déportation des Juifs de France, de Belgique et des Pays-Bas. Les Juifs étrangers ou apatrides, puis ceux de nationalité française, sont raflés avec l’aide de la police française en zone nord dès l’été 1941 et sous le contrôle du gouvernement de Vichy en zone sud, en août 1942. Ainsi, dans les Alpes-Maritimes, l’importance prise par la communauté juive dans le département (12 717 déclarés dont 7 554 étrangers) favorise la réalisation d’une opération comparable à la rafle parisienne du « Vél d’Hiv ».

Les 26 et 27 août 1942, 610 Juifs étrangers sont arrêtés par la police et la gendarmerie française, rassemblés à la caserne Auvare à Nice puis envoyés en train au camp de Drancy, en région parisienne. Planifiée avec soin par le gouvernement de Vichy, cette opération policière de grande envergure émeut l’opinion publique. D’autres Juifs sont envoyés au camp des Milles (Bouches-du-Rhône) ou à celui de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales).

La caserne Auvare à Nice pour regrouper 3 000 personnes, 1942

Compléments audio

Écouter le témoignage d’André Poch-Karsenti, enfant juif caché par le réseau " Marcel " à Nice, Grasse et Cannes, sur le compte des Archives départementales des Alpes-Maritimes sur Dailymotion :

Les Alpes-Maritimes sous l’occupation italienne puis allemande

Les Alpes-Maritimes sont occupées par l’armée italienne à partir de novembre 1942, puis l’armée allemande à partir de septembre 1943.

Le 8 novembre 1942, les Anglo-américains débarquent en Afrique du Nord. En moins de 24 heures, toute la zone non-occupée est contrôlée par les forces allemandes et italiennes pour prévenir un débarquement allié. À Toulon, le gros de la flotte de haute mer choisit de se saborder. La France est entièrement sous tutelle allemande tandis que la Provence et la Côte d’Azur sont occupées par la quatrième armée italienne soit 30 000 hommes, à partir du 11 novembre. La police militaire pourchasse les résistants et les fascistes italiens multiplient vexations et persécutions. Plusieurs milliers de Juifs, fuyant l’occupation allemande, se réfugient dans la zone sous contrôle italien. Cela leur apporte un répit pendant une dizaine de mois. Les Italiens adoptent à leur égard une attitude bienveillante, les protégeant de l’administration française et des collaborateurs. Toutefois, une partie des Juifs est assignée à résidence à Saint-Martin-Vésubie par les autorités italiennes lors de l’occupation de leur zone, continuant ainsi la politique déjà mise en place par Vichy.

Le débarquement des Alliés en Sicile en juillet 1943, puis en Italie, provoque l’effondrement du régime de Mussolini. Le 8 septembre 1943, l’Italie signe un armistice avec les Alliés, ce qui entraîne l’invasion des forces allemandes. Le 9 septembre, les troupes italiennes se retirent des Alpes-Maritimes dans le désordre. L’occupation allemande se traduit principalement par une fortification intensive du littoral azuréen, de Théoule à Menton, afin d’empêcher un éventuel débarquement allié. Une centaine de casemates sont construites ; 100 000 mines sont posées ; des murets de béton barrent la Promenade des Anglais à Nice et la Croisette à Cannes. Les civils sont requis pour garder les voies ferrées ou pour l’organisation allemande Todt qui assure les travaux de fortification. Les Alpes-Maritimes sont soumises à un régime d’occupation renforcée semblable à celui de la zone nord. Les difficultés de ravitaillement s’accroissent car, en se fournissant sur les marchés, les troupes d’occupation allemande privent la population des produits de première nécessité. Les relations des occupants avec la population se durcissent. La Gestapo s’installe à Nice à l’hôtel Excelsior et à Cannes à la villa Montfleury, et elle organise la chasse aux Juifs et la répression des Résistants.

Avec ses auxiliaires français, PPF et Milice, la Gestapo multiplie les exactions en 1944, torture et déporte. La police allemande réprime et près de 400 Azuréens sont ainsi envoyés en Allemagne, notamment Pierre Bertone (réseau Buckmaster), Raoul Brès (réseau Alliance), René Meffre (groupe Rémy), Philippe Rodat (Mouvements unis de Résistance) et le poète André Verdet. D’autres sont exécutés. Ange Grassi et Séraphin Torrin sont pendus aux réverbères de l’avenue de la Victoire à Nice ; cinq lycéens de Masséna sont capturés par la Milice et fusillés à Saint-Julien-du-Verdon. Certains villages sont particulièrement frappés, avant et après le débarquement allié, comme Puget-Théniers et Gattières. Plus de 500 Azuréens payent de leur vie leur engagement dans la Résistance.

Un juif exprime sa satisfaction d'être sous la protection italienne, 1943

Compléments audio

Écouter le témoignage de Jeannette Wolgust, enfant juif caché par le réseau « Marcel » sur le compte des Archives départementales des Alpes-Maritimes sur Dailymotion :