Compléments pédagogiques

Quelques clés supplémentaires pour mieux comprendre le génocide.

Glossaire

Quelques définitions...

 

Antisémitisme

Doctrine ou activité politique, à fondement raciste, hostile aux Juifs.

Armistice

Accord conclu entre les gouvernements d’États en guerre pour suspendre les combats.

CNR

Conseil national de la Résistance créé en 1943 par Jean Moulin pour unir les différents mouvements de la Résistance.

Camps d’extermination

Camps servant à éliminer les populations jugées inférieures et nuisibles comme les Juifs et les Tziganes.

Camps de concentration

Camps servant à emprisonner et à éliminer les opposants et les Résistants de toute l’Europe.

Collaboration

Attitude de ceux qui, pendant la Seconde Guerre mondiale, ont aidé les occupants nazis et parfois souhaité leur victoire définitive.

Diktat

Mot allemand signifiant « chose imposée ». Le terme est utilisé en Allemagne pour désigner le traité de Versailles de 1919.

Épuration

Action d’exclure d’un groupe social ou d’un parti les personnes dont la conduite est jugée condamnable ou indigne. Le terme est employé pour désigner les collaborationnistes du régime de Vichy qui ont été sanctionnés à la Libération.

France libre

Mouvement de Résistance à l’Allemagne créé à Londres par le général De Gaulle. Il devient ensuite la France combattante.

Front national 

Mouvement de Résistance encadré par le Parti communiste.

FTP

Francs-tireurs et partisans.

Génocide

En 1946, l’Assemblée générale des Nations unies définit le génocide comme « le refus du droit à l'existence de groupes humains entiers ». Un génocide se traduit par l’assassinat organisé et systématique d’un groupe humain de même origine ethnique ou religion.

Gestapo

Police politique de l’État nazi qui traque les Résistants et les Juifs.

Kapo

Le mot Kapo désigne les personnes qui sont chargées d'encadrer les prisonniers dans les camps de concentration nazis. Les Kapos sont souvent recrutés parmi les prisonniers de droit commun les plus violents.

Kommando

Unité de travail forcée dans laquelle les prisonniers sont regroupés.

L’Empire 

L’ensemble des possessions de la France dans le monde en Afrique (du Nord, Occidentale, Équatoriale) et en Asie (Indochine).

Ligne de démarcation

« Frontière » séparant la partie nord de la France (occupée par les Allemands) de la partie sud dite « Libre »

Maquis

Groupes de Résistants opérant contre l’ennemi dans des régions difficiles d’accès.

Milice

Groupement paramilitaire de Vichy collaborant avec les nazis. Elle est créée et dirigée par le niçois Joseph Darnand, en 1943 (transformation des SOL)

MUR

Mouvements unifiés de la Résistance.

Pogrom

Mot d’origine russe qui désigne l’assaut d’une partie de la population contre une autre, avec meurtres et pillages. Il est spécifiquement utilisé pour désigner les campagnes de violence contre les Juifs.

PPF

Parti populaire français fondé par Jacques Doriot. Parti politique d’extrême droite favorable à la collaboration avec l’Allemagne.

Occupation 

Nom donné en France à la période 1940-1944 pendant laquelle les troupes allemandes occupent la France.

Racisme

Doctrine selon laquelle certains groupes humains seraient inférieurs aux autres.

Rafle

Arrestation massive de personnes menée par l’armée ou la police.

Régime de Vichy

Gouvernement de la France dirigé par le maréchal Pétain de 1940 à 1944. Il lance la Révolution nationale et la collaboration avec l’Allemagne.

Relève

À partir de juin 1942, échange d’ouvriers partant travailler en Allemagne contre la libération de prisonniers français.

Réseau 

Groupes clandestins de Résistants.

Résistance 

Réunion de tous ceux qui refusent la défaite militaire de la France en 1940, luttent contre l’occupant et ceux qui collaborent avec lui.

Révolution nationale 

Doctrine et politique du régime de Vichy fondées sur les valeurs traditionnelles de « Travail, famille, patrie ».

SOL (Service d’ordre légionnaire) 

Formation paramilitaire sous le régime de Vichy, issue en 1941 de la Légion française des combattants. Elle doit encadrer et surveiller les Français.

Solution finale 

Décision prise en 1942 par les nazis pour éliminer les Juifs grâce aux camps d’extermination.

STO (Service du travail obligatoire) 

À partir de 1943, les jeunes Français sont contraints d’aller travailler en Allemagne.

Zone libre /Zone sud

Partie de la France non occupée par les Allemands.

Zone nord

Partie de la France occupée par les Allemands.

 

 

Les grandes étapes du génocide

Comment le génocide s’est mis en place depuis l’avènement d’Adolf Hitler jusqu’à la fin de la Deuxième guerre mondiale.

1.       Le boycott des commerces juifs (1933)

Le 1er avril 1933, quelques mois après l’arrivée au pouvoir d’Hitler, est mise en œuvre la première action planifiée contre la communauté juive allemande. Goebbels organise un boycott d’une journée des magasins juifs en « réponse aux boycotts antinazis dans le monde ».

Des membres de la SA (Sturmabteilung, formation paramilitaire nazie) sont postés devant les magasins juifs pour interdire l’entrée de clients, des étoiles de David sont peintes sur les vitrines qui sont parfois détruites. L’opération est un échec car la population allemande n’adhère pas encore à l’antisémitisme du régime et elle porte préjudice aux Allemands qui travaillent dans ces magasins.

2.       Les lois de Nuremberg (1935)

Les lois de Nuremberg désignent l’ensemble de lois raciales votées par le Reichstag réuni à Nuremberg pendant le congrès annuel du parti en septembre 1935. La loi « sur la citoyenneté allemande » établit que seuls les citoyens de sang allemand jouissent des droits politiques, ce qui exclut les Juifs de la vie politique.

La loi « pour la protection du sang allemand et de l’honneur allemand » interdit les mariages et les relations sexuelles entre les Juifs et les citoyens allemands. Les Juifs ne peuvent plus employer des domestiques féminins de sang allemand de moins de 45 ans.

Il est aussi interdit aux Juifs de faire flotter un drapeau du Reich.

En novembre de la même année, une ordonnance d’application vise à définir qui est Juif :

  • est Juif celui qui descend d’au moins trois grands-parents juifs,
  • est Juif le ressortissant métissé de juif qui descend de deux grands-parents juifs et qui est de religion juive ou qui est marié à une personne juive.

Un Juif n’étant pas un citoyen, il ne peut plus occuper d’emploi public. Tous les fonctionnaires juifs sont donc mis à la retraite le 31 décembre 1935.

3.       Conférence d’Évian (6 au 12 juillet 1938)

La conférence d’Évian se tient à l’initiative du président F.D. Roosevelt pour traiter la question des réfugiés juifs qui fuient l’Allemagne et l’Autriche (annexée depuis mars 1938). Elle réunit 32 pays d’Europe, d’Amérique ainsi que l’Australie et la Nouvelle Zélande. C’est un échec car seule la République dominicaine accepte de recevoir des réfugiés, les autres pays utilisant souvent la crise économique comme excuse pour refuser l’ouverture de leurs frontières. La France, pour sa part, déclare ne plus pouvoir en accueillir davantage car elle a atteint « un point extrême de saturation ».

Cet échec est utilisé par la propagande nazie : les Juifs posent un réel problème, aucun pays n’accepte de les recevoir alors que le Reich est prêt à les laisser émigrer.

4.       La Nuit de Cristal (novembre 1938)

Goebbels, ministre de l’Éducation du peuple et de la propagande, utilise comme prétexte l’assassinat à Paris d’un diplomate allemand par un jeune Juif polonais pour lancer un vaste pogrom dans tout le Reich dans la nuit du 9 au 10 novembre 1938.

Des milliers de magasins juifs (7 500) et de nombreuses synagogues (319) sont détruits par des membres de la SA (Sturmabteilung, Section d’assaut), des policiers et des membres des jeunesses hitlériennes, dans ce qui est présenté par les nazis comme un mouvement spontané de la population. Le nom provient des nombreuses vitrines détruites et du verre qui jonche les rues.

Une centaine de Juifs sont assassinés et 30.000 sont arrêtés et envoyés dans les camps de concentration de Dachau, Sachsenhausen et Buchenwald. Ils sont peu à peu libérés s’ils s’engagent à émigrer.

La communauté juive est également forcée de payer une amende d’un milliard de reichsmarks pour la mort du diplomate et pour « avoir provoqué la juste colère du peuple allemand ».

Ce pogrom accélère également l’émigration des Juifs hors du Reich.

5.       La politique d’euthanasie (opération T4), à partir de septembre 1939

Au nom de la « pureté de la race », les nazis lancent en septembre 1939 un programme d’élimination « des vies qui ne méritent pas d’être vécues » connu sous le nom d’opération T4. Cela concerne les malades mentaux, les incurables ou les handicapés physiques qui représentent une charge financière pour le Reich et qui « affaiblissent la race ».

Cinq centres sont installés en Allemagne et un en Autriche où les victimes sont assassinées le plus souvent par le gaz (monoxyde de carbone) ou par injections mortelles et ensuite incinérées dans des fours crématoires.

L’opération T4 fait officiellement 70 273 victimes entre janvier 1940 et le 21 août 1941, date de son arrêt par Hitler face aux protestations des Églises et d’une partie de la population. Elle continue secrètement durant toute la guerre et fait entre 200 000 et 275 000 victimes selon les sources présentées au procès de Nuremberg. Cette opération  est directement liée à la Shoah car elle constitue d’une part le premier meurtre de masse, et d’autre part une partie de ses responsables sont recrutés pour mettre en place les centres de mise à mort de l’Aktion Reinhard en Pologne (Belzec, Sobibor et Treblinka).

6.       Le premier statut des Juifs en France (octobre 1940)

Comme l’indique le dictionnaire de la Shoah, la loi du 3 octobre 1940 symbolise l’alignement de l’État français sur le modèle des « lois raciales » de l’Allemagne nazie. Pour la première fois, le Juif était défini comme catégorie raciale spécifique. Ce statut des Juifs, durci par un second en juin 1941, définit qui est considéré comme juif et les exclut de la fonction publique et de nombreuses professions (cinéma, justice, journalisme, etc.).

En mars 1941 est créé le Commissariat général aux questions juives chargé de mettre au point et d’exécuter la législation antijuive, tout en menant la politique d’aryanisation des propriétés et entreprises détenues par des Juifs.

Le 2 juin 1941, le régime de Vichy décide le recensement obligatoire de tous les Juifs de la zone libre et de la zone occupée en vue de créer un fichier central des Juifs. Ce fichier facilite grandement les futures grandes rafles comme celle du Vel’ d’Hiv des 16 et 17 juillet 1942.

Le 7 octobre 1942 la citoyenneté française est retirée aux Juifs d’Algérie. Vichy collabore avec l’Allemagne nazie dans la politique de déportation mais rencontre l’opposition d’une partie de la population quand les Allemands s’en prennent aux Juifs français, alors qu’auparavant essentiellement des Juifs d’origine étrangère avaient été déportés.

Au total 77 000 Juifs français sont déportés pendant la guerre (près de 80 % d’entre eux sont arrêtés par la police ou la gendarmerie française et livrés aux Allemands). La plupart sont envoyés à Auschwitz, les autres à Sobibor ou Maïdanek. Seuls 3 % en reviennent.

7.       Les ghettos (à partir de 1939)

Le terme « ghetto » est un terme d’origine vénitienne (1516) qui désigne le quartier juif de la ville. Pendant la guerre, les Juifs d’Europe orientale sont obligés d’abandonner leurs foyers et sont isolés dans des quartiers fermés.

Les principaux ghettos se trouvent en Pologne où ils sont mis en place entre septembre 1939 et décembre 1941. Toutes les grandes villes ont leur ghetto, celui de Varsovie étant le plus important avec plus de 450 000 personnes, suivi par Lodz (200 000). On en trouve également en Lituanie, Lettonie, Biélorussie et Ukraine. Ils sont dirigés par des conseils juifs, les Judenräte, formés de notables juifs chargés de les administrer. Ils servent ainsi de courroie de transmission entre les Allemands et les populations des ghettos. Leur rôle a été très critiqué car certains les accusent d’avoir facilité la tâche des nazis.

Le président du conseil juif de Varsovie, Adam Czerniakov se suicide au tout début des déportations de juillet 1942 car il a compris les objectifs nazis. De son côté, M. Rumkowski, le président du conseil juif de Lodz, cède à toutes les demandes nazies, y compris les déportations. De plus, il se comporte de façon dictatoriale avec la population du ghetto. Cela n’empêche pas sa déportation à Auschwitz en août 1944. Partout une police juive existe fait régner l’ordre. Elle participe plus tard à leur liquidation.

Il n’y a pas de règles générales qui régissent les ghettos. Certains sont isolés par des murs, d’autres par des barrières en bois ou de simples barbelés mais tous souffrent de la faim organisée par les nazis. L’entassement à 5 ou 6 personnes par pièce et des conditions sanitaires déplorables s’ajoutent à la faim et provoquent une très forte mortalité due au développement de nombreuses maladies.

Au printemps 1942, les Allemands commencent les déportations et les ghettos sont vidés dans une violence extrême. Les Juifs sont envoyés dans les centres de mise à mort de l’opération Reinhard (Treblinka pour Varsovie par exemple). Lodz est le dernier, liquidé à son tour en 1944.

8.       La « Shoah par balles » (à partir de juin 1941)

La « Shoah par balles » est le nom que l’on donne à l’action des groupes mobiles de tueries de la SS (les Einsatzgruppen) qui suivent l’avancée de la Wehrmacht en URSS à partir de juin 1941.

Quatre Einsatzgruppen sont formés :

  • le groupe A (1 000 hommes) opère dans les Pays baltes,
  • le groupe B (650 hommes) est chargé de la Biélorussie et de la région de Smolensk,
  • le groupe C (700 hommes) s’occupe du nord et du centre de l’Ukraine,
  • le groupe D (600 hommes) agit dans le sud de l’Ukraine et en Crimée.

Ces 3 000 SS sont aidés lors des tueries par des bataillons de police de l’armée régulière et par des milices locales, principalement des Lituaniens et des Ukrainiens.

Jusqu’à la mi-août ils fusillent essentiellement des cadres communistes (commissaires politiques, membres du Parti, etc.) et des hommes juifs en âge de combattre, en tout 50 000 victimes. Entre la mi-août et mi-décembre sont exécutés 450 000 Juifs, hommes, femmes et enfants. Les 29 et 30 septembre 1941, sont fusillés 33 771 Juifs dans la banlieue de Kiev à Babi Yar, qui devient le symbole de ces massacres de masse.

Le scénario est presque toujours identique. Les Allemands et leurs auxiliaires encerclent la ville ou le village, les Juifs sont regroupés et emmenés à la périphérie. Là, les victimes se déshabillent et sont conduites devant des fosses où elles sont fusillées.

Himmler assiste à une fusillade en août et comprend que ce moyen ne convient pas car les tueurs sont traumatisés et le procédé trop lent et peu discret. Des camions à gaz sont utilisés un peu plus tard mais cela aussi s’avère trop lent. En se fondant sur l’expérience acquise durant l’opération T4, les nazis décident d’utiliser des chambres à gaz pour détruire les Juifs d’Europe.

Au total la « Shoah par balle » fait plus de 1,5 million de morts. Certains historiens pensent que le chiffre est plus élevé car bien souvent les victimes ne sont pas comptées.

9.       Le camp de Maïdanek (à partir de juillet 1941)

Situé à proximité de la ville de Lublin (est de la Pologne), Maïdanek est, comme Auschwitz, un camp « mixte ». C’est à la fois un camp de prisonniers de guerre soviétiques, un camp de concentration et à partir de septembre 1942 un centre de mise à mort.

Près de 500 000 personnes de 54 nationalités différentes passent par le camp où périssent 250 000 personnes dont 118 000 Juifs.

Le camp est libéré le 24 juillet 1944 après une offensive éclair de l’Armée rouge qui empêche les SS de détruire les chambres à gaz, dont une qui fonctionnait au monoxyde de carbone et l’autre au Zyklon B. Ce sont les seules qui nous soient parvenues totalement intactes.

10.   Le camp de Chelmno (à partir de décembre 1941)

Situé à l’ouest de Lodz dans la partie de la Pologne annexée par le Reich (le Warthegau), Chelmno est le premier centre de mise à mort à fonctionner : le premier gazage a lieu en décembre 1941. Chelmno est chargé de l’extermination des Juifs de Lodz et de l’ensemble du Warthegau à l’aide de trois camions à gaz (camion dans lequel le pot d’échappement aboutit dans la cabine arrière du véhicule).

Le camp comprend deux parties, l’une située dans le village où on fait croire aux victimes qu’elles vont être conduites dans un camp de travail. Elles doivent d’abord prendre une douche. Elles se déshabillent mais sont embarquées ensuite dans un des camions à gaz. En une dizaine de minutes, les victimes sont asphyxiées et le camion rejoint l’autre partie du camp située dans une clairière à proximité. Là une équipe de prisonniers juifs (le Sonderkommando) vide le camion et enterre les morts dans d’immenses fosses. À partir de l’été 1942, les corps sont brûlés.

Entre décembre 1941 et mars 1943, 150 000 personnes sont exterminées, (dont environ 4 000 Tziganes autrichiens), déportés en octobre 1941 dans le ghetto de Lodz. Le camp reprend son activité pendant trois semaines en juin et juillet 1944, période durant laquelle 7 000 Juifs du ghetto de Lodz sont assassinés.

11.   La Conférence de Wannsee (20 janvier 1942)

La conférence de Wansee se tient dans la banlieue de Berlin le 20 janvier 1942 et réunit autour de Heydrich (numéro 2 de la SS et chef du RSHA, service de sécurité du Reich), les divers secrétaires d’État chargés des politiques antijuives du Reich ainsi que plusieurs responsables de la SS dont Eichmann.

À cette date les Einsatzgruppen ont déjà exterminé des centaines de milliers de Juifs en URSS, Chelmno fonctionne depuis début décembre et Belzec est en construction. La Solution finale est déjà donc en marche à l’Est et la conférence de Wannsee sert à coordonner l’action des différents ministères.

Heydrich annonce « l’évacuation » des Juifs d’Europe de l’ouest vers l’Est où ils sont soumis au travail forcé qui élimine la majorité d’entre eux. Le plan concerne un million de Juifs, y compris ceux qui ne sont pas encore sous contrôle allemand. La conférence dure seulement une heure et demie dont une bonne partie concerne les Juifs de couple mixte et leurs enfants. Leur sort n’est pas tranché.

12.   L’Aktion Reinhard (à partir de mars 1942 et jusqu’à octobre 1943)

« Aktion Reinhard » est le nom de code (en l’honneur de Reinhard Heydrich numéro 2 de la SS, assassiné par la résistance tchèque) donné à l’opération d’extermination des 2,3 millions de Juifs du Gouvernement général de la Pologne occupée. 450 Allemands (dont 92 ayant participé au programme « d’euthanasie », l’Aktion T4) et des auxiliaires ukrainiens (formés dans le camp de Trawniki) sont affectés à l’opération sous le commandement du général SS Globocnik installé à Lublin.

Trois centres de mise à mort sont mis en service : Belzec et Sobibor dans la région de Lublin et Treblinka au nord-est de Varsovie :

  • Belzec est construit entre novembre 1941 et mars 1942, et le premier gazage a lieu le 17 mars 1942. Le centre cesse son activité en décembre 1942. De janvier à avril 1943 les détenus du Sonderkommando ouvrent les fosses et brûlent les corps. En juin 1943, le camp est démantelé.
  • Sobibor est édifié entre mars et avril 1942 et les gazages commencent début mai de la même année. Le 14 octobre 1943 les prisonniers se révoltent et près de 300 réussissent à s’enfuir. 200 survivront.
  • Treblinka est mis en service en juillet 1942 pour exterminer les Juifs du ghetto de Varsovie. Une révolte a lieu le 2 août 1943 et une centaine de prisonniers réussissent à s’enfuir. Le camp est détruit par les Allemands en novembre 1943.

Les trois camps fonctionnent sur le modèle de Belzec avec chacun 20 à 30 SS et 100 à 120 Ukrainiens, des chambres à gaz qui utilisent les gaz d’échappement de moteurs de tanks (pas de Zyklon B), et une main-d’œuvre fournie par des prisonniers (700 à 1 000 appelés Sonderkommandos) pour trier les biens des victimes, couper les cheveux, vider les chambres à gaz, etc. Au début les corps sont ensevelis dans des fosses, puis à partir de l’été 1942, ils sont brûlés à l’air libre (il n’y a pas de four crématoire).

Le nombre de victimes des trois camps est difficile à évaluer (il n’y a pas de sélection et tous les Juifs d’un convoi sont envoyés à la mort dès leur arrivée) et il y a des différences selon les sources :

  • Belzec : 500 000 à 600 000 morts, essentiellement des Juifs de Pologne mais aussi allemands, autrichiens, tchèques et slovaques.
  • Sobibor : 150 000 à 250 000 victimes, dont une majorité de Polonais mais aussi provenant d’autres pays européens (4 convois de France avec 4 003 personnes en mars 1942).
  • Treblinka : 900 000 victimes dont plus du tiers de Varsovie et de sa région (du 23 juillet au 21 septembre 1942).

Pendant l’Aktion Reinhard, les Allemands confisquent de nombreux biens juifs (évalués à 200 millions de dollars américains actuels), constitués d’or, bijoux, argent et des textiles divers.

13.   L’ Aktion 1005 (à partir de l’été 1942)

Aktion 1005 est le nom de code donné par les nazis à l’opération qui a pour but d’effacer les traces du génocide. Décidée début 1942, elle est confiée à Paul Blobel, ancien chef d’un Sonderkommando de l’Einsatzgruppen C qui la met en œuvre durant l’été 1942.

Blobel dirige en même temps la crémation des cadavres des centres de mise à mort et celle des victimes de la Shoah par balles. Les cadavres sont déterrés par des prisonniers juifs et ensuite brûlés sur d’immenses brasiers. Les prisonniers sont ensuite exécutés à leur tour.

Le grand nombre de fosses communes et l’avancée de l’Armée rouge empêchent les nazis d’accomplir leur travail et de nombreuses fosses ne peuvent pas être brûlées.

14.   Le soulèvement du ghetto de Varsovie (avril 1943)

Le ghetto de Varsovie est le plus grand ghetto d’Europe. Sa population atteint 440 000 personnes en juin 1941. En mai 1942, du fait d’une très forte mortalité (maladies, sous alimentation, mauvais traitements, etc.), la population n’est plus que de 400 000 habitants.

En juillet 1942 commencent les grandes déportations. En huit semaines, 300 000 personnes sont déportées dans le centre de mise à mort de Treblinka.

Deux organisations de résistance aux idéologies opposées voient le jour. L’Organisation juive de combat (la plus importante) et l’Union militaire juive. Les deux groupes sont très peu armés (quelques pistolets et grenades achetés à la Résistance polonaise) et savent que leur combat est sans espoir.

Le 19 avril 1943, les Allemands commencent la liquidation finale du ghetto et sont surpris par la résistance armée. Après quelques jours de lutte à découvert, les combattants se réfugient dans des bunkers préparés depuis des mois. Les Allemands décident alors d’incendier systématiquement les immeubles les uns après les autres. Le 8 mai, le bunker de commandement est détruit et les combats sont sporadiques. Quelques groupes réussissent à s’enfuir dans la partie polonaise de Varsovie et le 16 mai, les Allemands proclament leur victoire en incendiant la grande synagogue de Varsovie.

Les pertes allemandes sont faibles, 15 morts et 90 blessés. Du côté des insurgés, 56 065 sont capturés. 7 000 sont exécutés immédiatement et 6 000 meurent lors des combats et incendies. Les autres sont déportés à Treblinka.

Si l’insurrection est une défaite militaire, elle se fait connaître dans toute l’Europe occupée. Le symbole est fort : quelques centaines de Juifs mal armés ont tenu tête pendant trois semaines à 2 000 Allemands et à leurs chars et leurs canons. C’est aussi la première insurrection d’une ville contre l’occupant nazi.

Varsovie n’est pas le seul cas de résistance armée face à la Solution finale. D’autres ghettos combattent les nazis (Bialystok en août 1943, Vilnius en septembre 1943) et les déportés des centres de mise à mort de Treblinka et Sobibor se soulèvent et des centaines de prisonniers réussissent à s’enfuir. À Auschwitz-Birkenau même, les membres du Sonderkommando du Crématoire IV se révoltent le 7 octobre 1944.

15.   L’Aktion Erntefest (« fête de la moisson », novembre 1943)

Aktion Erntefest est le nom de code donné à la liquidation de tous les Juifs des différents camps de la région de Lublin en novembre 1943. En trois jours, plus de 43 000 Juifs sont fusillés par les SS.

C’est dans le camp de Maïdanek que l’Aktion Erntefest a en partie lieu. Le 3 novembre 1943, 18 000 Juifs sont fusillés en une seule journée.

16.   Les marches de la mort (à partir de l’été 1944)

« Les marches de la mort » est le nom donné par les prisonniers des camps de concentration aux marches forcées des déportés devant l’avance des troupes alliées la dernière année de la guerre. Ces marches se font généralement à pied sur de longues distances pendant lesquelles les SS abattent les déportés qui n’arrivent pas à suivre le rythme.

Les premières marches concernent les camps de Pologne, de Prusse orientale et de Hongrie à partir de l’été 1944, en raison de l’avance de l’Armée rouge. La plus importante est celle du complexe d’Auschwitz en janvier 1945 durant laquelle plus de 60 000 prisonniers parcourent à pied dans le froid plus de 50 kilomètres avant d’être entassés dans des wagons de marchandise. De là, ils sont envoyés dans des camps à l’ouest (Gross-Rosen, Dachau, Buchenwald et Mauthausen). Plus de 15 000 meurent de froid ou sont abattus par les SS.

De février à avril 1945, les nazis évacuent camp après camp en raison de l’arrivée des Alliés. Les routes du centre de l’Allemagne et de l’Autriche sont parcourues par de longues colonnes de déportés affamés et brutalisés par les gardes, dans l’indifférence de la population.

On estime à près de 300 000 le nombre de victimes des marches de la mort, parmi lesquelles une majorité de Juifs.

Sources et bibliographie

Pour en savoir plus, des pistes de recherches et de lecture.

Bibliographie sommaire 

ARAD Yitzhak. Belzec, Sobibor, Treblinka. Indiana University Press, 1999. 450 p. (ouvrage en anglais)
BENSOUSSAN Georges (sous la direction de).  Dictionnaire de la Shoah. Paris : Larousse, 2009. 637 p.
BENSOUSSAN Georges (sous la direction de). Le livre de mémoire ; traces de l’enfer. Paris : Larousse, 2015. 128 p.
BROWNING Christopher.  Des hommes ordinaires. Paris : Les Belles Lettres, 2006. 340 p.
FORGES Jean-François et BISCARAT Pierre-Jérôme.  Guide historique d’Auschwitz. Paris : Autrement, 2011. 288 p.
FRIEDLÄNDER Saul. L’Allemagne nazie et les Juifs, tome 1 et 2. Paris : Seuil, 2008. 529 p.
HILLBERG Raul. La destruction des Juifs d’Europe, tomes 1,2 et 3. Collection Folio Histoire. Paris : Gallimard, 2006. 2448 p.
JOLY Laurent. Vichy dans la « Solution finale ». Paris : Grasset et Fasquelle, 2006. 1014 p.
KLARSFELD Serge. Vichy Auschwitz. Paris: Fayard, 2001. 391 p.
KUWALEK Robert.  Belzec. Paris : Calmann-Lévy,2013. 360 p.

Témoignages de déportés 

BORLANT Henri. « Merci d’avoir survécu ». Paris : Seuil, 2011. 385 p.
BORLANT Henri  et GRINSPAN Ida. Traces de l’enfer. Paris : Larousse, 2015. 128 p.
FRANK Anne. Le Journal. Paris : Le Livre de Poche, nouvelle édition 2013. 368 p.
GRINSPAN Ida et POIROT-DELPECH Bertrand. J’ai pas pleuré. Paris : Pocket Jeunesse, 2012. 192 p.
LEVI Primo. Si c’est un homme. Paris : Pocket, 1988. 213 p.
VENEZIA Shlomo. Sonderkommando, dans l’enfer des chambres à gaz. Paris : Le Livre de Poche, 2009. 250 p.

Sites internet 

Mémorial de la Shoah : http://www.memorialdelashoah.org
United States Holocaust Memorial Museum : http://www.ushmm.org
Yad Vashem World Center For Holocaust Research : http://yadvashem.org
Le grenier de Sarah: http://www.grenierdesarah.org