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Bai Ming, le geste et la pensée

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Porcelaines et peintures de Bai Ming, une exposition du 11 juillet au 27 septembre 2020.

Plasticien et céramiste à la renommée mondiale, Bai Ming est un artiste chinois originaire de la ville de Jingdezhen, berceau de la porcelaine chinoise.

Ses créations d’une grande finesse allient tradition et modernité.

L’exposition au musée des arts asiatiques est l’occasion de découvrir ses pièces aux motifs dépouillés, abstraits ou naturalistes empreints d’une grande poésie.

Le geste et la pensée chez Bai Ming

© DR

« Plus simple est le geste, plus profonde est la pensée » est une formule qui pourrait s’appliquer à la pratique artistique de Bai Ming, en particulier à sa sinité car chacune de ses œuvres porte en elle la puissance évocatrice et la tradition millénaire des lettrés chinois.

L’artiste revendique en effet ses origines et considère que son travail de réinterprétation s’enracine dans l’histoire artistique, intellectuelle et philosophique de son pays.

Cette simplicité vers laquelle tendent ses œuvres est liée à la fadeur que l’on retrouve dans tous les aspects de la culture chinoise. Dénigrée en Occident, cette saveur est essentielle, presque idéale, en Extrême-Orient. La virtuosité sous-jacente mais aussi les années d’étude et de pratique pour l’atteindre sont effacées pour laisser place à une sobriété visuelle et une facilité d’exécution toutes chinoises.

Rappelons que Bai Ming est un céramiste virtuose au savoir-faire hors-norme.
D’un point de vue pratique, théorique et historique, il maîtrise l’ensemble de la chaîne opératoire de la fabrication d’une porcelaine, du choix de la matière première à la cuisson, alors que dans les manufactures chaque étape est confiée à un spécialiste.

Il est pourtant conscient qu’une esthétique technique ne suffit pas à un processus artistique et vise « une correspondance entre la main et le cœur ».
Il cherche à atteindre cet état créatif, à la frontière de la méditation, dans lequel « il oublie les choses et s’oublie lui-même », dans la droite lignée de la quête d’unité entre l’homme et la nature.
Il est ce lettré détenteur d’un concours mandarinal, au sommet de ses compétences, qui s’engage sur un chemin au pied de la montagne pour rejoindre une rustique cabane cachée au milieu des arbres, près d’une rivière.
C’est dans cette cabane qu’il méditera sur le sens des choses et qu’il produira des œuvres parcourues par les souffles de la création.

Bai Ming est ainsi l’héritier et le continuateur d’une tradition longue, à la fois morale et technique, qu’il s’efforce d’explorer et de renouveler avec pour ambition de l’accompagner toujours plus loin.

Pour aller plus loin...

L’artiste

© DR

Bai Ming est né en 1965 à Yugan dans la province du Jiangxi (Chine), à une centaine de kilomètres de Jingdehzhen, capitale mondiale de la porcelaine.

Lauréat en 1990 du concours d’entrée à l’Académie centrale des beaux-arts et de l’artisanat (Pékin), il y étudie l’art et les techniques de la céramique. Profondément marqué par son apprentissage chinois, il aura toujours à cœur d’enrichir ses réflexions de références issues d’une histoire de l’art mondial.

Son vocabulaire plastique reprend ainsi des formes et des motifs chinois mais il s’est aussi nourri des travaux de Lucio Fontana sur l’espace, de Marcel Duchamp sur la perception ou encore d’Antoni Tàpies sur la matière. Bai Ming est aujourd’hui professeur à l’Université Tsinghua (Pékin) où il dirige le département Céramique de l’Académie des arts et du design.

Il est reconnu mondialement pour ses recherches universitaires ainsi que pour ses productions artistiques. Certaines de ses œuvres ont été acquises par de grandes institutions muséales telles que le British Museum (Londres), les National Art Museum of China et National Museum of China (Pékin), et le musée Cernuschi (Paris).

Dix ans après une mémorable résidence à Vallauris, Bai Ming visite le musée départemental des arts asiatiques de Nice en octobre 2019 et reconnaît un lien conceptuel entre l’institution et sa production artistique. Un dialogue s’est établi pour faire résonner les correspondances et proposer une redécouverte du musée grâce aux œuvres de l’artiste chinois.

Une rencontre entre un artiste et un lieu

Les œuvres de Bai Ming reflètent une sensibilité particulière pour l’architecture et le design.

Sa conception de l’espace, ses choix d’échelles, son sens de la composition trouvent des correspondances dans l’architecture de Kenzo Tange aux formes pures et délicates. Le plasticien chinois et l’architecte japonais ont en commun un design de la simplicité apparente qui porte en lui plus de mille ans d’histoire et de réflexion en Extrême- Orient.

Cette apparence efface délibérément les années d’étude, de travail et d’expérimentation pour offrir la quintessence de ce qui est produit. Les deux artistes partagent également une relation privilégiée avec le cosmos et leur démarche vise une forme de recréation du monde.

D’un côté, Kenzo Tange reprend les figures fondamentales que sont le carré et le cercle et les agence à la manière d’un mandala pour inscrire son bâtiment dans la sphère asiatique.

De l’autre, Bai Ming se place dans la continuité de l’esprit lettré dans lequel l’artiste-démiurge fait surgir le monde en combinant Vide et Plein.

Dans ces univers réinventés, l’environnement et la nature occupent une place centrale.
En effet, le musée de marbre et de verre ne s’envisage pas dans l’esprit du Japonais sans le parc et le lac qui l’entourent.

Tout est fait pour que l’expérience de l’extérieur s’immisce dans celle de l’intérieur. De même, les œuvres du Chinois présentent essentiellement des éléments naturels qui s’animent sur leur support et contiennent une signification philosophique.

Enfin, il est important de rappeler que le musée a été pensé pour créer un pont entre l’Asie et l’Occident. Fort de son expérience et de ses réflexions dépassant les frontières, Bai Ming fait partie de ces artistes, vecteurs de partage, qui déclenchent ce voyage intérieur.

Blue Lines of Water
Porcelaine, H. 56 cm, 2009
© DR

L’esprit asiatique : Bai Ming et les collections du musée

Between Ceramics and Stone VI
Porcelaine, 39 cm × 20 cm × 10 cm, 2009
© DR
Between Ceramics and Stone
Porcelaine, 65 cm × 14 cm × 11 cm, 2009
© DR

L’oeuvre de Bai Ming convoque l’esprit qui habite les collections du musée départemental des arts asiatiques.

Constituées avec soin à partir de 1996, celles-ci forment une sélection représentative des arts et des traditions pratiqués sur l’ensemble du continent. Les céramiques, peintures et laques de Bai Ming y trouvent naturellement leur place et remettent en perspective les oeuvres anciennes présentées dans les salles, de la matière à la signification en passant par les formes et les techniques.

Elles permettent de rappeler la profonde spiritualité qui a influencé les artistes au fil des siècles. Les œuvres du plasticien teintées de bouddhisme faisant référence aux grottes de Mogao (Dunhuang, Chine) ou portant des motifs tels que le lotus conversent paisiblement avec les sculptures installées dans la rotonde dite « bouddhique » du musée, espace dédié au dénominateur commun des civilisations asiatiques.

Le taoïsme est également une grande source d’inspiration et de référence pour Bai Ming : le titre de sa série Great Achievements like Incomplete Series est une citation du Livre de la Voie et de la Vertu, texte attribué à Laozi.

Les œuvres créées dans cet esprit font écho à des pierres de lettrés ou encore à une robe de prêtre taoïste présentées dans l’exposition permanente du musée.

Au-delà du sacré, du philosophique et du monde chinois, les productions de Bai Ming entrent également en résonance avec les œuvres originaires du Japon, d’Inde et d’Asie du Sud-Est exposées au musée. A titre d’exemple, son oeuvre intitulée Straw Mat Veins Like Book Shadows accompagne un très rare paravent japonais portant des scènes extraites de la littérature insulaire. La correspondance se fait sur la signification savante des pièces mais aussi sur le choix du papier comme matériau et son traitement précieux.

Stacks of Scripture Scrolls
Peinture à la laque, 100 cm × 200 cm, 2019
© DR